1er décembre 1996 : le jour où Arnaud Boetsch a sauvé trois balles de match avant de faire gagner la Coupe Davis à la France

Chaque jour, Tennis Majors remonte le temps pour revenir sur un événement marquant pour la planète tennis. Aujourd’hui, nous retournons en 1996 pour voir comment le Français Arnaud Boetsch, mené 6-7, 0-40 dans le cinquième set par Nicklas Kulti, a renversé la vapeur pour devenir le premier joueur à arracher la Coupe Davis au cinquième set du match décisif.

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Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : Un scénario épique

Ce jour-là, le 1er décembre 1996, grâce à la victoire miraculeuse d’Arnaud Boetsch sur Nicklas Kulti (7-6, 2-6, 4-6, 7-6, 10-8), la France remporte la Coupe Davis pour la deuxième fois en cinq ans, en battant la Suède, 3-2. C’est la première fois dans l’histoire de la compétition que le titre se décide au cinquième set de l’ultime match. La finale de la Coupe Davis 1996 est également la dernière apparition de l’ancien numéro un mondial Stefan Edberg, qui se blesse malheureusement au pied le premier jour en affrontant Cédric Pioline.

Les personnages : Arnaud Boetsch et Nicklas Kulti

  • Arnaud Boetsch, qui a atteint son meilleur classement cette année-là

Le Français Arnaud Boetsch, né en 1969, était l’un des meilleurs joueurs au monde chez les juniors. Vainqueur de l’Orange Bowl en 1985, il obtient cette année-là une wild card pour participer aux qualifications de Wimbledon (où il est éliminé d’entrée). Malgré ces succès précoces, Boetsch n’entre dans le top 100 qu’en 1991, année où il dispute sa première finale sur le circuit principal, à Berlin (battu par Petr Korda, 6-3, 6-4) et atteint pour la première fois les huitièmes de finale d’un tournoi du Grand Chelem (à Roland-Garros, battu par l’Argentin Franco Davin, 7-6, 4-6, 6-3, 6-1). Au cours des années suivantes, il atteint les huitièmes de finale des quatre tournois du Grand Chelem et remporte trois titres ATP, dont le plus notable à Toulouse, en 1995, où il conserve son titre en battant en finale l’ancien numéro un mondial, Jim Courier (6-4, 6-7, 6-0). Il obtient son meilleur classement ATP, 12e mondial, en avril 1996.

Arnaud Boetsch à Marseille en 1998, crédit : Fep / Panoramic
  • Nicklas Kulti, ancien roi chez les juniors

Nicklas Kulti, né en 1971, était très prometteur à un très jeune âge. Vainqueur des épreuves juniors de l’Open d’Australie et de Wimbledon en 1989, il termine l’année numéro 1 mondial junior et est vu comme l’héritier des grands joueurs Suédois – Björn Borg, Mats Wilander et Stefan Edberg. Cependant, malgré un premier titre remporté dès 1991, à Adelaïde (où il bat Michael Stich en finale, 6-3, 1-6, 6-2), sa carrière sur le circuit principal ne se montre pas à la hauteur de ces attentes. Le meilleur classement qu’il ait jamais atteint est le 32ème rang mondial, en 1993, et sa meilleure performance en Grand Chelem reste un quart de finale disputé à Roland-Garros en 1992 (battu par Henri Leconte, 6-7, 3-6, 6-3, 6-3, 6-3).

Le lieu : le Malmö Isstadion, en Suède

La finale de la Coupe Davis 1996 a lieu en Suède, au Malmö Isstadion, une enceinte sportive couverte d’une capacité de 5 800 spectateurs. Siège de l’équipe de hockey sur glace de Malmö, elle est également été utilisée pour des concerts, comme le concours de l’Eurovision en 1992.

L’histoire : après que Pioline en soit passé tout proche, Boetsch offre la Coupe Davis à la France en revenant de nulle part

Bien avant qu’elle ne commence, les fans de tennis s’attendaient déjà à ce que la finale de la Coupe Davis 1996 soit pleine d’émotion. En effet, il s’agissait de la dernière apparition de l’un des plus grands joueurs de la dernière décennie, Stefan Edberg. L’ancien numéro un mondial, six fois titré en Grand Chelem, avait annoncé douze mois plus tôt qu’il prendrait sa retraite à l’issue de la saison 1996. Il a remporté la Coupe Davis à quatre reprises, et cette dernière finale est l’occasion de mettre un terme à sa carrière en beauté. Mais Edberg n’en aura pas  l’occasion, blessé au pied le premier jour de la finale contre Cédric Pioline, qui apporte ainsi le premier point à la France (6-3, 6-4, 6-3). Thomas Enqvist, seul joueur du top 10 présent à Malmö, égalise ensuite, ne laissant aucune chance à Arnaud Boetsch (6-4, 6-3, 7-6), mais le samedi, Guy Forget, le héros de 1991, fait équipe avec Guillaume Raoux pour battre Jonas Björkman et Nicklas Kulti (6-3, 1-6, 6-3, 6-3), donnant à la France une précieuse avance de 2-1.

La tension est à son comble le dimanche 1er décembre. Au cours des deux premières manches du quatrième match, Pioline réalise une véritable démonstration pour se détacher deux sets à zéro face à Enqvist (6-3, 7-6). Mais le Suédois, qui a récemment remporté le prestigieux tournoi de Paris-Bercy, ne baisse pas les bras et revient dans le match, 6-4, 6-4, poussant le Français au cinquième set. Pioline se retrouve ensuite tout près de la victoire, menant même, 5-2, mais il ne parvient pas à conclure le match et Enqvist s’impose finalement, 9-7, après plus de quatre heures de jeu.

Lorsque Boetsch et Kulti – qui avait la lourde tâche de remplacer Stefan Edberg – font leur entrée sur le court pour jouer le cinquième match, la tension se lit sur leurs visages. Le Français remporte le premier set, 7-6, mais il est ensuite dominé dans les deuxième et troisième sets (6-2, 6-4). Poussé par son capitaine, Yannick Noah, qui avait déjà mené la France au titre en 1991, Boetsch s’accroche et remporte le quatrième set, 7-6. Pour la toute première fois en 95 ans d’existence de la Coupe Davis, un cinquième set décisif va être joué dans le cinquième match de la finale – mais ce set marquera aussi les mémoires pour une raison supplémentaire. 

Près de quatre heures après le début de la rencontre, le Français est mené 6-7, 0-40 sur son service, faisant ainsi face à trois balles de match consécutives. Cependant, après avoir échangé un regard lourd de sens avec son capitaine, Boetsch parvient à les écarter.  Deux jeux plus tard, c’est lui qui prend le service de Kulti pour mener 9-8. Il lui faut encore trois balles de match avant de sceller sa victoire et, aussi incroyable que cela aurait pu paraître 15 minutes plus tôt, il décroche le titre de la Coupe Davis, à 22h56, après avoir sauvé trois balles de match dans le cinquième set du match décisif. Au total, les deux matchs de la journée ont duré neuf heures et 13 minutes. 

“Alfred Hitchcock n’aurait pas fait mieux”, résume le capitaine suédois Axel Hageskog, cité par Reuters.

“Cette semaine a été très très dure. Nous avons travaillé très dur et au niveau mental, c’était très très difficile. C’était ma première finale en tant que joueur de simple titulaire, une nouvelle expérience qui générait beaucoup de stress, une nouvelle responsabilité”, a raconté Boetsch à Reuters. “Le premier jour, je prends une raclée. Stefan Edberg se blesse et nous ne sommes pas sûrs qu’il va jouer le dernier jour. A 2-2 le dimanche, je ne sais pas qui je vais jouer mais à partir de là, ramener ce point c’était ma mission.”

Malgré leur grande joie, les Français n’oublient pas de rendre un hommage à Edberg – Noah, le capitaine, le portant sur ses épaules pour un dernier tour d’honneur.

La postérité du moment : ce match restera comme le sommet de la carrière de Boetsch

La finale de la Coupe Davis 1996 restera le sommet de la carrière tennistique d’Arnaud Boetsch. L’équipe de France, de retour à Paris, aura l’honneur de parader sur les Champs-Elysées. Après sa retraite, il apparaîtra souvent comme commentateur sportif avant de devenir directeur de la communication de la société Rolex. La France remportera à nouveau la Coupe Davis cinq ans plus tard, notamment grâce à un Nicolas Escudé grandiose.

Nicklas Kulti prendra sa retraite en 2000. Il restera impliqué dans le tennis en tant qu’entraîneur et fondateur d’une académie de tennis en Suède avec les anciens joueurs Magnus Norman et Mikael Tillström.

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