1er septembre 1987 : Le jour où Lendl a infligé un « triple bagel » à Moir

Le 1er septembre 1987, un Ivan Lendl au sommet de son art s’est imposé sans concéder le moindre jeu face à Barry Moir (6-0, 6-0, 6-0) au premier tour de l’US Open. Il s’agissait là seulement du quatrième « triple bagel » de l’histoire du tennis.

Ivan Lendl

Ce qui s’est passé ce jour-là et pourquoi cela a marqué l’histoire du tennis : Lendl n’a même pas laissé les miettes

Le 1er septembre 1987, Ivan Lendl, qui avait largement dominé la tournée d’été américaine sur dur, inflige à Barry Moir un triple 6-0 au premier tour de l’US Open. Ce n’est que la quatrième fois de l’ère Open qu’un joueur parvient à s’imposer en Grand Chelem sur le score de 6-0, 6-0, 6-0. Dans le jargon tennistique, cela porte un nom : « triple bagel ».

Les acteurs : Ivan Lendl et Barry Moir

  • Ivan Lendl est au sommet de sa gloire

Né en 1960, Ivan Lendl est numéro 1 mondial en août 1986. Passé pro en 1978, il se pose depuis 1980 comme l’un des quatre meilleurs joueurs au monde avec Bjorn Borg, John McEnroe et Jimmy Connors. Bien qu’il ait déjà remporté des dizaines de tournois ATP, dont le Masters 1981 en venant à bout de Vitas Gerulaitis (6-7, 2-6, 7-6, 6-2, 6-4), il ne parvient pas à décrocher un titre du Grand Chelem avant 1984. A vrai dire, il a échoué à quatre reprises en finale, une fois à Roland-Garros (en 1981, battu par Bjorn Borg), deux fois à l’US Open (battu par Jimmy Connors, en 1982 et 1983) et une autre en Australie (battu par Mats Wilander en 1983). En 1984, Lendl triomphe finalement à Roland-Garros, venant à bout de John McEnroe à l’issue d’une finale légendaire où il surmonte un handicap de deux sets. 

En 1985, Lendl atteint la finale des Internationaux de France (battu une nouvelle fois par Wilander). Mais à l’US Open, quelques semaines après être redevenu numéro 1 mondial, il décroche un deuxième titre du Grand Chelem aux dépens de John McEnroe (7-6, 6-3, 6-4). En 1986, il s’impose à Roland-Garros pour la deuxième fois, dominant Mikael Pernfors en finale (6-3, 6-2, 6-4). Mais à Wimbledon, il s’incline en finale contre le jeune tenant du titre Boris Becker (6-4, 6-3, 7-5). En 1987, Lendl est au sommet de sa domination : après s’être imposé pour la troisième fois à Roland-Garros (aux dépens de Mats Wilander, 7-5, 6-2, 3-6, 7-6), il s’incline en finale de Wimbledon face à Pat Cash (7-6, 6-2, 7-5).

Ivan Lendl during 1981 French Open

Lendl redéfinit les standards du jeu de fond de court, avec un coup droit lifté très puissant qui lui permet d’être à la fois agressif et extrêmement régulier, poussant ses adversaires à un rude combat physique. Il redéfinit également les standards en termes de préparation, s’entraînant plus que quiconque auparavant, bien plus soucieux de sa condition physique et de son alimentation que n’avaient l’habitude de l’être les tennismen de l’époque.

  • Barry Moir, en balade autour de la 100e place mondiale

Le Sud-Africain Barry Moir est né en 1963. Après avoir joué sous les couleurs de l’Université d’Auburn, en Alabama, il se lance sur le circuit en 1985. Il obtient ses meilleurs résultats sur les tournois Challenger, ne disputant pas la moindre finale sur le circuit principal. Avant l’US Open 1987, il n’a participé qu’à trois tableaux finaux de Grand Chelem, sa meilleure performance étant un troisième tour atteint à New York en 1986 (éliminé par Dan Goldie, 6-0, 4-6, 6-7, 6-1, 6-2). Peu après ce tournoi, il grimpe à la 92e place mondiale, son meilleur classement. 

Le lieu : L’US Open

L’US Open (appelé US Nationals avant 1968 et le début de l’Ère Open) a été créé en 1881. Bien qu’il soit le seul Grand Chelem à avoir été disputé sans la moindre interruption depuis ses débuts, le tournoi a changé de site à plusieurs reprises au fil des ans. Les premières éditions se déroulent sur les courts en herbe du Casino de Newport, à Rhode Island, puis en 1915, l’épreuve s’installe à New York, au West Side Tennis Club, dans le quartier de Forest Hills,  jusqu’en 1977 (avec une parenthèse de 1921 à 1923, où les joueurs s’affrontent à Philadelphie). 

De 1975 à 1977, le tournoi se dispute sur terre battue. En 1978, l’US Open quitte le West Side Tennis Club, désormais trop petit pour accueillir un événement d’une telle importance, pour l’USTA National Tennis Center, situé à Flushing Meadows, à New York. Par la même occasion, le tournoi se dispute à présent sur dur. Le Tennis Center est l’un des plus grands complexes de tennis au monde et son court central est le Stade Louis-Armstrong, d’une capacité de 14 000 places.

L’histoire : 6-0, 6-0, 6-0 en 71 minutes chrono, Lendl en démonstration

A l’été 1987, la domination d’Ivan Lendl est à son apogée. Depuis sa défaite face à Pat Cash en finale de Wimbledon, le Tchécoslovaque n’a plus perdu le moindre match, remportant le tournoi de Washington (détruisant en finale Brad Gilbert, 6-1, 6-0), celui de Stratton Mountain (où il profite en finale de l’abandon au deuxième set de John McEnroe), et enfin celui de Montréal (prenant le dessus en finale sur Stefan Edberg, 6-4, 7-6). A l’US Open, il a atteint la finale chaque année depuis 1982, et il a triomphé deux fois consécutivement en 1985 et 1986.

Il va sans dire que personne n’aurait parié le moindre centime sur son adversaire, Barry Moir, 122e mondial, au premier tour de l’US Open 1987. Néanmoins, même si personne ne croyait que Moir pourrait poser la moindre difficulté au numéro 1 mondial incontesté, personne n’avait imaginé que, sans aucune pitié, Lendl s’imposerait sans perdre le moindre jeu (6-0, 6-0 6-0) en seulement 71 minutes. 

Au cours de ce match à sens unique, Moir passe 91% de premiers services. Mais malgré cette belle statistique, il ne gagne que quinze points sur sa mise en jeu. Lendl n’a que trois balles de break à écarter : une au premier set, deux au deuxième.

« Il n’a pas la puissance nécessaire, explique Lendl, cité par upi.com. Son meilleur coup semble être le retour de service. Cela ne me gêne pas, parce que je ne monte pas au filet. En fait, il joue à peu près de la même façon que moi, sauf que je frappe plus fort et que je rate un peu moins, c’est comme ça qu’on en arrive à un score comme ça. »

C’est la troisième fois qu’un score pareil est infligé en 1987. A Roland-Garros, Karel Novacek avait ainsi humilié Eduardo Bengoechea, et à Wimbledon, c’est Stefan Edberg qui avait donné une leçon à Stefan Eriksson. Des années auparavant, à Roland-Garros, en 1968, c’est à Daniel Contet que Nikola Spear avait infligé le premier triple 6-0 de l’Ère Open.

La postérité du moment : Lendl s’imposera à New York

Ivan Lendl confirmera sa mainmise sur le circuit à l’été 1987 en s’imposant à l’US Open, ne lâchant pas le moindre set avant la finale, qu’il remportera face à Mats Wilander (6-7, 6-0, 7-6, 6-4). Ce sera le dernier de ses trois titres à New York.

En 1993, un cinquième « triple bagel », comme disent les anglophones, sera distribué au deuxième tour de Roland-Garros, le Français Thierry Champion subissant alors la loi de Sergi Bruguera. Cela reste, à ce jour, la dernière fois qu’un joueur s’est incliné sur le score de 6-0, 6-0, 6-0 lors d’un tournoi du Grand Chelem.

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