20 janvier 2008 : le jour où Hewitt et Baghdatis ont terminé leur match à 4h33 à l’Open d’Australie

Le 20 janvier 2008, au 3e tour de l’Open d’Australie, Lleyton Hewitt et Marcos Baghdatis disputent le match le plus tardif de l’histoire du tournoi.

On this day, 20.01.2021 On this day, 20.01.2021

Ce qu’il s’est passé ce jour-là et pourquoi c’est historique : Hewitt et Baghdatis se sont battus jusqu’au milieu de la nuit

Ce jour-là, le 20 janvier 2008, Lleyton Hewitt et Marcos Baghdatis disputent le match le plus tardif de l’histoire de l’Open d’Australie. Le local de l’étape s’impose en cinq sets (3-6, 7-5, 7-5, 6-7, 6-3) après 4h45 de combat, concluant la rencontre à 4h33 du matin ! Les deux anciens finalistes du tournoi battent là un record datant de 2007, et détenu par Andreas Seppi, qui avait battu Bobby Reynolds à 3h34. La décision prise par l’organisation de lancer le match à presque minuit crée une petite polémique.

Les acteurs : Lleyton Hewitt et Marcos Baghdatis

  • Lleyton Hewitt, champion précoce

Lleyton Hewitt, fils d’un joueur professionnel de football australien, est né en 1981. Très habile au retour de service, il possède l’un des meilleurs jeux de jambes au monde, et il est surtout un incroyable combattant : son caractéristique “come on !” est célèbre dans le monde du tennis.En janvier 1997, à l’âge de 15 ans et 11 mois seulement et sans classement ATP, il est invité aux qualifications de l’Open d’Australie, où il remporte trois matches pour devenir le plus jeune qualifié de l’histoire du tournoi (battu au premier tour du tableau principal par Sergi Bruguera, 6-3, 6-4, 6-3).

Un an plus tard, en 1998, le jeune Aussie surprend le monde du tennis en remportant son premier titre ATP avant même son 17e anniversaire, dans sa ville natale d’Adelaïde. En cours de route, il y bat le grand André Agassi (7-6, 7-6) et, en finale, il bat Jason Stoltenberg (3-6, 6-3, 7-6). En 2000, il devient le premier joueur de moins de 20 ans à remporter quatre titres en une saison depuis Pete Sampras; le plus important de ces quatre titres est le tournoi du Queen’s, où il bat en finale Sampras, sextuple champion de Wimbledon (6-4, 6-4). C’est également en 2000 qu’il obtient son premier grand résultat en Grand Chelem, atteignant les demi-finales de l’US Open, où Sampras prend sa revanche du Queen’s (7-6, 6-4, 7-6). “Rusty”, comme l’appelle son entraîneur Darren Cahill, fait désormais partie du top 10, et en 2001, il change encore de dimension en triomphant à l’US Open, en battant Sampras en finale (7-6, 6-1, 6-1).

Quelques semaines plus tard, après son succès au Masters, il devient le plus jeune n°1 mondial de l’histoire, et il occupe cette place 80 semaines durant, et notamment pendant l’intégralité de la saison 2002, au cours de laquelle il gagne Wimbledon (battant en finale David Nalbandian, 6-2, 6-3, 6-2) et le Masters (aux dépens de Juan Carlos Ferrero, 7-5, 7-5, 2-6, 2-6, 6-4). Après avoir perdu la première place en 2003, Hewitt reste l’un des meilleurs joueurs du monde pendant deux bonnes années, finaliste à l’US Open 2004 (battu par Roger Federer, 6-0, 7-6, 6-0) et à l’Open d’Australie 2005 (battu par Marat Safin, 1-6, 6-3, 6-4, 6-4). Il quitte définitivement le top 10 au début de l’année 2006 et, blessé successivement au genou, au bassin, à la main, au poignet, au dos et au pied, il n’a pas réussi à se hisser dans le dernier carré d’un tournoi du Grand Chelem depuis.

  • Marcos Baghdatis, 16e mondial

Marcos Baghdatis, né en 1985 à Chypre, est le seul joueur professionnel de son pays. Venu en France à l’âge de 13 ans, il se forme à l’académie de Mouratoglou, et devient n°1 mondial juniors en 2003. Il intègre le top 100 en 2005, réussissant un premier bon résultat en Grand Chelem à l’Open d’Australie 2005, où il n’est éliminé qu’en huitièmes de finale par Roger Federer (6-2, 6-2, 7-6), et à la fin de cette saison, il est aux portes du top 50 grâce à une finale disputée à Bâle (battu par Fernando Gonzalez, 6-7, 6-3, 7-5, 6-4). Il se fait connaître du grand public en janvier 2006, lorsqu’il se hisse en finale de l’Open d’Australie alors qu’il n’est que 54e joueur mondial.

En route vers le dernier dimanche du tournoi, il élimine Andy Roddick (n°3 mondial), Ivan Ljubicic (n°8) et David Nalbandian (4e mondial, contre qui il remonte un handicap de deux manches pour s’imposer 3-6, 5-7, 6-3, 6-4, 6-4), avant de s’incliner face à Federer (5-7, 7-5, 6-0, 6-2). Cette année-là, il parvient également en demi-finale de Wimbledon (battu par Rafael Nadal, 6-1, 7-5, 6-3), puis il remporte le premier titre de sa carrière à Pékin aux dépens de Mario Ancic (6-4, 6-0). Ces résultats lui permettent d’atteindre la 8e place mondiale, ce qui restera le meilleur classement de sa carrière. En 2007, il ajoute notamment un deuxième titre à son palmarès à Zagreb (en battant Ivan Ljubicic, 7-6, 4-6, 6-4) et atteint les quarts de finale de Wimbledon (éliminé par Novak Djokovic, (7-6, 7-6, 6-7, 4-6, 7-5). Au début de l’Open d’Australie 2008, il est 16e mondial.

Le lieu : Melbourne

Contrairement aux autres tournois du Grand Chelem, l’Open d’Australie (d’abord appelé Championnat d’Australasie puis Championnat d’Australie) a changé plusieurs fois de lieu au fil des ans. L’épreuve changeait même de ville chaque année avant de s’installer à Melbourne en 1972, et pas moins de cinq villes australiennes l’ont accueillie à au moins trois reprises : Melbourne, Sydney, Adelaide, Brisbane et Perth. Ses dates ont été assez mouvantes également, entre début décembre et fin janvier, faisant de l’Open d’Australie parfois le premier, parfois le dernier Grand Chelem de la saison.

Jusqu’en 1982, la plupart des meilleurs joueurs font l’impasse sur l’épreuve en raison de son éloignement et des prix insuffisants, mais à partir de la victoire de Mats Wilander, la dynamique change. Pour rendre le tournoi plus attractif, le comité du tournoi déploie d’énormes efforts qui mènent au déménagement de l’épreuve vers un nouveau site, Flinders Park (qui sera plus tard renommé Melbourne Park), à l’abandon du gazon pour des courts en dur, et à la construction du premier court central doté d’un toit rétractable. La dotation augmente également, et il ne faut alors que quelques années pour que l’Open d’Australie devienne le Grand Chelem préféré de nombreux joueurs. Le dernier Australien à s’y être imposé est Mark Edmondson, en 1975, et dans les années 2000, tous les espoirs locaux reposent sur Lleyton Hewitt.

L’histoire : Baghdatis a poussé Hewitt dans ses retranchements

Le 20 janvier 2008, le match du troisième tour entre le local de l’étape Lleyton Hewitt et Marcos Baghdatis, tous deux anciens finalistes de l’Open d’Australie, est prévu comme le point culminant de la night session. Et pourtant, il s’en faut de peu pour que le duel soit repoussé : au cours de la journée, Roger Federer a été forcé de livrer un combat de cinq manches face à Janko Tipsarevic (6-7, 7-6, 5-7, 6-1, 10-8), et les spectateurs de la session nocturne ne sont autorisés à entrer dans le stade qu’à 22 heures. Le temps que Venus Williams élimine Sania Mirza (7-6, 6-4), il est près de minuit. Officiellement, la politique de l’Open d’Australie est de ne lancer aucun match après 23h, mais, d’après Craig Tiley, directeur du tournoi, la règle est à l’appréciation du juge-arbitre.

« Nous avons pris en considération les préoccupations des joueurs, des services de sécurité, des spectateurs et des diffuseurs avant de prendre notre décision », déclare Tiley.

« Nous n’avons pas vraiment eu le choix », expliquera quant à lui Hewitt. « Nous avions un avis, mais nous n’avons pas eu le choix. » Malgré l’heure tardive, 15 000 spectateurs se pressent dans les tribunes.

Malgré ce démarrage nocturne, il faudra quelques retournements de situation pour que le match dure plus de quatre heures et devienne le match le plus tardif de l’histoire du tournoi (le précédent record étant 3h34 du matin).

J’aurais dû  conclure au quatrième set, quand je jouais bien

Lleyton Hewitt

Tout d’abord, à un set partout, Baghdatis se tord la cheville, et, alors qu’il reçoit des soins, ses chances de pouvoir poursuivre la partie semblent compromises. Mais non seulement le Chypriote reprend le jeu, mais il se détache même 5-3 au troisième set, avant de voir l’Australien remonter et empocher la manche, 7-5. Après la perte de ce set, Baghdatis s’effondre, et il est bientôt mené 5-1 au quatrième set. Une fois de plus, la fin semble proche pour le finaliste de l’édition 2006, mais il retrouve soudain sa concentration et, après avoir écarté une balle de match à 5-2, il refait son retard et pousse Hewitt au cinquième set.

« C’était dur parce que jusqu’à 5-1, il ne mettait pas une balle dans le court dans ce quatrième set », expliquera ensuite Hewitt, selon le New York Times. « Mais à son crédit, il s’est mis à jouer relâché et à beaucoup tenter, en lâchant de gros services sur les points importants. Je n’ai certainement pas joué mes deux meilleurs jeux de service et il a repris l’avantage. »

Finalement, lorsque l’ancien n°1 mondial remporte le cinquième set (6-4), il est 4h33. Les joueurs viennent de finir le match le plus tardif (ou le plus matinal ?) de l’histoire du tennis.

“J’aurais dû  conclure au quatrième set, quand je jouais bien”, a déclaré Hewitt. “Mais c’est l’une de mes meilleures victoires, mentalement, d’être revenu et de l’avoir battu au cinquième set, donc je suis assez fier. (…) “Ce n’était pas facile pour nous deux. Evidemment, c’était une journée de tennis incroyable. Combien de fois est-ce que Federer est poussé à jouer cinq sets ? C’est dur pour tout le monde. Marcos et moi sommes dans le même bateau.”

La postérité du moment : Hewitt perdra dès le tour suivant face à Djokovic

Lleyton Hewitt sera éliminé en huitièmes de finale par le futur vainqueur du tournoi, un jeune de 20 ans nommé Novak Djokovic (7-5, 6-3, 6-3). Il ne reviendra jamais dans le top 10, n’atteignant qu’une seule fois les quarts de finale d’un tournoi du Grand Chelem, à Wimbledon 2009 (battu par Andy Roddick, 6-3, 6-7, 7-6, 4-6, 6-4). Il prendra sa retraite à l’issue de l’Open d’Australie 2016.

Marcos Baghdatis ne parviendra pas à maintenir le niveau de motivation de ses premières années sur le circuit. Il ne disputera plus jamais les quarts de finale d’un tournoi majeur, et il ne retrouvera jamais le top 15 mondial. Il remportera le dernier de ses quatre titres à Sydney, en 2010 (aux dépens de Richard Gasquet, 6-4, 7-6). Le Chypriote prendra sa retraite en 2019.

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