Les 10 meilleurs joueurs (retraités) qui n’ont jamais gagné de tournoi du Grand Chelem

Tennis Majors se penche ici sur un sacré dossier : le classement des joueurs qui n’ont jamais gagné de Grand Chelem. L’occasion aussi de leur rendre un peu de la gloire que l’infortune leur a éternellement, et plus ou moins injustement, refusé.

David Ferrer, Roland-Garros 2013 David Ferrer, Roland-Garros 2013 – © FEP / Panoramic

Ils auraient pu, ils auraient dû… Mais le destin en a décidé autrement. L’histoire du tennis regorge de joueurs bourrés de talent qui ne sont pas tout à fait allés au bout de leur potentiel et n’ont pas remporté ce titre suprême qui leur tendait quasiment les bras.

Précisons que pour établir ce classement des meilleurs joueurs de l’histoire du tennis à ne pas avoir gagné de Grand Chelem, et pour limiter un peu notre embarras du choix, nous nous sommes limités aux retraités. Sinon, il est possible qu’un Alexander Zverev eût décroché la palme, devant foule de prétendants (Dimitrov, Tsonga, Nishikori, etc.). Mais lui devrait rapidement corriger le tir, c’est du moins tout le mal qu’on lui souhaite. 

Nous nous sommes aussi limités à l’ère Open, sinon l’exercice devenait impossible. Pour le reste, nous avons dressé la hiérarchie selon des critères liés au palmarès, la classe naturelle, la place laissée dans l’histoire et, peut-être plus encore, laissée dans notre cœur.

Malgré tout, vous avez le droit de ne pas être d’accord. Et même de le faire savoir.

N°10 : Tomas Berdych, la force multi-surfaces

Sa carrière, qui s’est étalée sur 17 ans entre 2002 et 2019, a été phénoménale de constance. Tomas Berdych a gagné sur les toutes les surfaces et tous les continents, il a remporté 13 titres dont celui du Rolex Paris Masters, en 2005, à 20 ans. 

On lui promettait alors une destinée radieuse : elle l’a été, avec un “mais” : le Tchèque, numéro quatre mondial en 2015, fait partie de cette génération de joueurs sacrifiés sur l’autel du Big Three, qui lui aura brisé ses rêves du début à la fin.

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Berdych a essayé, pourtant : il a atteint le dernier carré de tous les Grands Chelems (sept en tout), dont la finale de Wimbledon en 2010, battu par Nadal. A chaque fois, il est tombé sur un os, lui qui compte d’ailleurs plus de finales perdues que de titres remportés.

Son jeu un peu monolithique l’a probablement empêché de passer le cap face aux monstres de son époque contre lesquels il a parfois fini par se montrer résigné. Sa persévérance et son talent auraient mérité mieux. 

N°9 : David Ferrer, le travail (presque) récompensé

Un profil similaire à celui de Berdych, pas dans le style de jeu mais dans la manière dont il a été systématique barré par ses contemporains du Big Three malgré une carrière exceptionnellement dense et longue, à laquelle il a (comme Berdych) mis un terme en 2019.

Toujours comme Berdych, l’Espagnol a atteint une finale de Grand Chelem, celle de Roland-Garros 2013, lui aussi battu par Nadal. Comme Berdych, il a également remporté pour unique Masters 1 000 le Rolex Paris Masters (en 2012).

Moins talentueux a priori que le Tchèque, il a pourtant fini par se forger un palmarès supérieur avec un total de 27 titres, plus trois Coupe Davis, une finale au Masters en 2007 et une place de numéro trois mondial à son meilleur. Pas mal pour un fumeur notoire (il avait néanmoins trois poumons).

Mais ce qui est terrible, c’est que, toujours comme Berdych, on n’a pas réellement la sensation qu’il ait été si proche de décrocher le gros lot. Lui aussi était né à la mauvaise époque, tout simplement. 

N°8 : Tom Okker, malgré les titres

Le temps qui a passé fait qu’il est souvent oublié dans ce débat des GOAT sans ceinture. Et pourtant, c’est bien lui qui détient, dans l’ère Open, le titre honorifique du joueur le plus titré n’ayant jamais remporté de Grand Chelem : 35 recensés par l’ATP (beaucoup plus si l’on compte l’ère pré-Open), dont le très relevé tournoi de Rome en 1968.

Cette année-là, le “Hollandais volant”, numéro trois mondial à son top, a perdu une finale de l’US Open au couteau contre Ashe (14-12, 5-7, 6-3, 3-6, 6-3). Sa plus belle occasion.

Il a ensuite disputé trois autre demi-finales majeures, à chaque fois battu par le futur vainqueur : Roland-Garros 1969 (Laver), l’Open d’Australie 1971 (Rosewall), l’US Open 1971 (Smith) et enfin Wimbledon 1978 (Borg), à 34 ans.

La preuve, tout de même, de sa constance, de sa polyvalence et de sa longévité. Okker, qui n’était pas un joueur très puissant, manquait peut-être d’un coup fort pour aller encore un peu plus haut. Mais si un CV pareil ne méritait pas un Grand Chelem…

N°7 : Guillermo Coria, à un point près

De tous les joueurs de cette liste, il est celui qui est passé le plus proche de ne pas y figurer puisqu’il avait obtenu deux balles de match lors d’une finale 2004 de Roland Garros sans queue ni tête face à son compatriote Gaston Gaudio (0-6, 3-6, 6-4, 6-1, 8-6).

Parce que sa carrière a été courte, qu’elle n’avait pas bien commencé avec un contrôle positif à la nandrolone en 2001, et qu’elle n’a pas bien fini avec une crise de confiance aigüe qui l’a poussé vers la sortie en 2009 (à 27 ans), on oublie parfois le niveau d’excellence qu’il a atteint à son sommet, entre 2003 et 2005.

Léger comme une plume, vif comme l’éclair, doté d’un œil de lynx et d’une main de velours qui lui a valu le surnom d’”El Mago” (le magicien), l’Argentin a été pendant deux ou trois saisons le meilleur joueur du monde sur terre battue, surface sur laquelle il a remporté 10 de ses 11 titres, dont les Masters Series de Hambourg en 2003 et de Monte Carlo en 2004.

Mais son destin était donc de ne pas gagner le titre suprême à Roland-Garros, passant tout proche de la disqualification en demi-finale contre un OVNI nommé Martin Verkerk, puis refusant l’obstacle lors de cette mythique finale 2004. 

Puis Nadal, contre lequel il a également perdu une finale dantesque à Rome en 2005, est arrivé, chassant définitivement ses illusions. La comète Coria aura été fugace. Mais brillante.

N°6 : Andreï Medvedev, le tsar en devenir

Un talent d’orfèvre au service d’une personnalité riche et cultivée. Andreï Medvedev a été un joueur très précoce, capable d’atteindre la deuxième semaine de Roland Garros à 17 ans en 1992, puis les demi-finales l’année suivante.

Il était alors pour beaucoup la star en devenir. Mais son corps fragile a quelque peu entravé sa marche avant, sans l’empêcher de signer une carrière courte mais intense : 11 titres dont quatre Super 9 (les anciens Masters 1 000) : celui de Monte Carlo en 1994 et celui de Hambourg par trois fois en 1994, 1995, 1997.

Son palmarès, essentiellement bâti sur terre battue (même s’il a atteint la deuxième semaine de tous les Grands Chelems), lui a permis d’atteindre la quatrième place mondiale en 1994.

Mais c’est pourtant en 1999, de retour de blessure, qu’il a failli décrocher la palme en menant deux sets à rien face à Andre Agassi en finale de Roland Garros : ce match, il l’a peut-être perdu par excès de “gentillesse”, parce qu’il a eu du mal à achever son ami qui, lui, visait l’histoire (1-6, 2-6, 6-4, 6-3, 6-4). Sa chance était passée…

N°5 : Miloslav Mecir, patte de velours

Difficile à séparer d’un Medvedev, dont il partageait la facilité et aussi une certaine indolence, frôlant parfois dans son cas la nonchalance. Comme Medvedev, Mecir compte 11 titres à son palmarès. Mais si lui n’était pas forcément voué à jouer les premiers rôles dans une époque infestée de monstres (Lendl, MecEnroe, Becker…), la globalité de son palmarès est quand même au-dessus de celle de l’Ukrainien.

La carrière du “Chat”, surnommé comme tel pour sa capacité à donner à la balle des coups de griffes masquées en caresses chatoyantes, compte trois victoires de prestige : le tournoi de Miami 1987, le Masters WCT la même année ainsi qu’une médaille d’or lors des premiers JO de l’ère moderne, à Séoul, en 1988.

Numéro quatre mondial début 1988, il a par ailleurs disputé deux finales de Grand Chelem : l’US Open 1986 – il a été à cette occasion le dernier à disputer une finale majeure avec une raquette en bois – et l’Open d’Australie 1989, à chaque fois terrassé par Lendl, sa bête noire. Mecir lui-même était celle de Wilander, qu’il a été le seul à battre en Grand Chelem en 1988, en quart de finale de Wimbledon, avant de mener deux sets à rien contre Stefan Edberg, futur vainqueur.

Très polyvalent, excellent joueur de double, Mecir a dû écourter sa carrière à 26 ans en raison de problèmes de dos. Il s’est éclipsé à pas de loup (ou plutôt de chat). Mais personne ne l’a oublié.

N°4 : Nikolay Davydenko, Maître sans couronne suprême

Il est le seul ici à n’avoir jamais disputé la moindre finale de Grand Chelem. Presque une anomalie vu sa constance au plus haut niveau entre les années 2005 et 2010. Peut-être même une injustice puisqu’il s’était incliné en demi-finale à Roland-Garros en 2005 (en cinq sets) contre Mariano Puerta, contrôlé positif par la suite.

Mais c’est ainsi. Davydenko a au beau jouer trois autres demi-finales majeures (Roland-Garros 2007, US Open 2006 et 2007), remporter 21 titres dont trois Masters 1 000 (Rolex Paris Masters 2006, Miami 2008, Shanghai 2009) et surtout le Masters à Londres en 2009 (en battant Nadal, Federer et Del Potro), il n’a jamais remporté le titre suprême.

La faute, là encore, aux monstres de son époque. Et pourtant, il était l’un des très rares capables de tutoyer leur niveau, notamment Nadal face auquel il affiche un bilan positif (Federer l’ayant en revanche martyrisé plus souvent qu’à son tour).

Davydenko, numéro trois mondial en 2006, également vainqueur de la Coupe Davis cette année-là, laisse toutefois l’image d’un joueur à la cadence de frappe exceptionnelle. Pas un grand bavard, mais un régal à voir jouer dans ses bons jours.

N°3 : Henri Leconte, gaucher magique

Attention, il y a un peu de talent brut dans notre podium Et qui dit talent dit Henri Leconte, peut-être pas le plus grand palmarès de cette liste (neuf titres au compteur tout de même, sur toutes les surfaces), mais l’un des plus naturellement doués.

On n’ira pas jusqu’à dire que Riton aurait mérité de gagner un Grand Chelem tant il fut surclassé par Wilander lors de sa seule finale majeure atteinte à Roland-Garros en 1988. Mais il reste le dernier Français à avoir atteint la finale du Grand Chelem parisien.

D’ailleurs, c’est peut-être sa première demi-finale perdue Porte d’Auteuil en 1986 (contre Pernfors) qui lui laisse le plus de regrets, lors d’une année où il a également atteint la demi-finale de Wimbledon et la place de numéro cinq mondial. Le meilleur Lendl l’attendait en finale.

Surnommé “le Cimetière” pour sa faculté à se transcender face aux meilleurs, le génial gaucher français au revers pince à sucre et à la volée foudroyante a peut-être toutefois disputé son meilleur match contre Sampras lors de la mythique finale de Coupe Davis 1991 remportée à Lyon par la France. 

Encore une fois demi-finaliste à Roland-Garros quelques mois plus tard, il s’est ensuite progressivement éclipsé, vaincu par une hernie discale récurrente. Moins blessé, plus constant, et mieux accompagné sur le plan mental comme il le dit lui-même réculièrement, il aurait pu aller plus haut. Mais ça n’aurait pas forcément eu le même charme…

N°2 : David Nalbandian, le plus grand rival du Big Three avant Murray

Lui, ce n’est pas un mais plusieurs Grands Chelems qu’il aurait dû remporter s’il s’était focalisé de manière moins intermittente sur son sport.

Il aurait peut-être même dû être l’égal du Big Four, vu qu’il était aussi (voire plus) fort que Federer chez les juniors – il l’avait battu en finale de l’US Open avec un an de moins – et reste à ce jour le seul à avoir battu Federer, Nadal et Djokovic dans un même tournoi : celui de Madrid en 2007, l’un des deux Masters 1 000 que compte son palmarès (riche de 11 titres en tout), avec celui du Rolex Paris Masters quelques semaines plus tard, en battant encore Federer et Nadal. Sans oublier bien sûr le Masters 2005 où, repêché, il avait triomphé en remontant deux sets de retard face à Federer.

Extrêmement complet, capable de prendre la balle la balle très tôt et de trouver des angles fantastiques, Nalbandian est le seul Argentin à avoir atteint les demi-finales de tous les Grands Chelems et notamment la finale de Wimbledon 2002 (perdue contre Hewitt), à seulement 20 ans. A un point près, il en aurait disputé une autre à l’US Open 2003, manquant une balle de match en demi-finale contre Roddick, futur vainqueur. 

Egalement demi-finaliste de l’Open d’Australie 2006, de Roland-Garros 2004 et 2006, il a à chaque fois eu tendance à caler dans ces grandes occasions. Le Gaucho, un peu bedonnant et souvent blessé à partir de 2009, n’avait peut-être pas suffisamment de grinta au fond de lui. Mais dans ses jours de grâce, quel régal…

N°1 : Marcelo Rios, le GOAT du talent pur

Il est le seul n°1 mondial de l’histoire à n’avoir jamais remporté de Grand Chelem. Ce n’est pas faute d’avoir manqué de talent – le mot est faible – ni d’avoir fait le nécessaire : en 1998, pour sa seule finale majeure atteinte à l’Open d’Australie, il a été stoppé en finale par un Petr Korda qui allait se faire attraper par la patrouille pour dopage quelques mois plus tard.

Cela dit, c’est plutôt à Roland-Garros qu’on attendait le plus le gaucher chilien. Mais il n’y a jamais fait mieux que quart de finale (deux fois), un résultat décevant pour un joueur qui avait réussi le hat-trick des Masters 1 000 sur terre battue (Monte-Carlo 1997, Rome 1998 et Hambourg 1999), pour un total de 18 titres.

Mais c’est donc finalement sur dur qu’”El Chino” (le Chinois) a vécu ses plus belles heures avec également ce rare doublé Indian Wells/Miami réussi en 1998, qui lui a permis d’atteindre le trône mondial, une première pour un Sud-Américain, à 22 ans.

Le qualificatif de génie, pour le coup, n’est pas galvaudé à son égard. Une tête de lard si vous voulez, peut-être même un autiste Asperger selon son auto-diagnostic , mais un surdoué au tennis enchanteur, insolent de facilité, dont la beauté de la gestuelle n’avait d’égale que celle de ses yeux verts. 

Grâce à sa patte de velours, il traçait des arabesques avec une balle de tennis qui lui obéissait au doigt et à l’œil. Peu de choses procurent autant de plaisir dans la vie qu’une compilation de ses plus beaux points. Avec quelques centimètres et quelques kilos de muscles en plus, peut-être un peu de plomb dans la tête également, Rios, qui a quitté la scène assez tôt (en 2004, à 28 ans) après des blessures à répétition, aurait pu être dans une autre liste : celle des GOAT.

On a pensé aussi à : Tim Henman, Cédric Pioline, Alex Corretja, Mark Philippoussis, Marcos Baghdatis. 

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