Patrick Mouratoglou : « Le tennis va droit dans le mur ! »

Alors que se déroulera ce week-end le premier tournoi de l’histoire de l’UTS, Patrick Mouratoglou dresse un constat très alarmant du tennis dans les colonnes du Parisien.

Un vent nouveau soufflera sur le tennis à partir de ce week-end. Alors que la saison est toujours à l’arrêt, Patrick Mouratoglou hébergera à partir de samedi sur les courts de son académie la première édition de l’histoire de l’UTS (Ultimate Tennis Showdown), sorte de ligue fermée née de l’imagination de Mouratoglou lui-même avec pour ambition de redonner un coup de fouet à un tennis devenu beaucoup trop poussiéreux aux yeux de nombreux spécialistes, le coach de Serena Williams en tête. « Le tennis va mal, mais ça ne se voit pas, parce qu’il y a une belle façade avec les trois plus grands champions de l’histoire (Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic). L’âge moyen du fan est de 61 ans et il vieillit chaque année. Il n’y a aucun renouvellement, le tennis ne convainc plus personne. Demain, ça peut aller très mal si rien ne change (…) On va droit dans le mur si on ne fait rien », martèle ce jeudi dans Le Parisien le technicien français, qui a fêté ses cinquante ans le 8 juin dernier.

Pour Mouratoglou, le problème vient avant tout du format du tennis, resté inchangé au même titre que ses règles, quand les autres sports ont compris qu’il fallait se renouveler pour ne pas perdre les fans. C’est dans ce sens que ce premier rendez-vous de l’UTS (le calendrier proposera neuf journées sur cinq week-ends, avant la phase finale de ce championnat qui se déroulera à huis-clos, le 12 juillet prochain) offrira du jamais-vu dans le monde de la petite balle jaune, avec non pas des sets au menu, mais des… quart-temps de dix minutes, comme au basket.

Vers des concepts inspirés de l’e-sport ? 

Autre innovation apportée par Mouratoglou et l’UTS : les joueurs, comme dans un jeu décisif, serviront deux fois de suite à tour de rôle. Et, clou du spectacle : à l’instar de ce qui se fait sur les jeux de console, ils pourront jouer des cartes bonus et malus pour influer sur le match. Mais pas tous, puisque ce sont les abonnés sur Twitter qui voteront pour savoir quel(s) joueur (s) pourra bénéficier de ce joker. « La manière de consommer le sport a évolué, le tennis non (…) Le format est hyper contraignant : tu ne sais jamais quand ton joueur favori commence ou finit, les matchs sont extrêmement longs (…) Il y a tellement de matchs où l’on s’ennuie. Il faut que l’on s’adapte et vive avec son temps (…) On peut contenter les fans historiques et en chercher de nouveaux. Il y a de la place pour plusieurs ligues professionnelles. En proposant du spectacle, du suspense, une interaction avec le public, on pense vraiment pouvoir fidéliser. »

C’est d’ailleurs aussi dans ce même but de fidéliser que ce circuit fermé qui verra notamment s’affronter les Français Lucas Pouille, Benoît Paire et Richard Gasquet, mais aussi des cadors du classement ATP comme Stefanos Tsitsipas, Matteo Berrettini et David Goffin sera diffusé en streaming (sur https://watch.utslive.tv/). Coût de l’abonnement : 9,99€ par mois.

« Un Grand Chelem sans les trois meilleurs, ça vaut la peine ? »

De quoi patienter en attendant la reprise de la saison. Mais si c’est pour reprendre (à l’US Open) sans Djokovic, Nadal et Federer, Mouratoglou n’en voit pas trop l’intérêt. « Le tennis doit redémarrer quand il sera prêt plutôt que trop tôt et très mal. On est partis pour jouer un Grand Chelem sans les trois meilleurs. Est-ce que ça vaut la peine ? », s’interroge dans le quotidien le coach français de Serena Williams, révélant au passage que sa protégée devrait elle aussi faire partie des nombreuses stars absentes à New York. « Je ne pense pas que Serena pense un instant aller passer trois semaines sans sa fille enfermée dans un hôtel à New York. Ne vaut-il pas mieux attendre trois mois de plus ? C’est vraiment une histoire d’argent. » Une histoire d’argent qui fait que les meilleurs mondiaux se partagent toujours l’essentiel des gains à l’heure actuel.

Serena Williams and Patrick Mouratoglou

Le fondateur de la plateforme Tennis Majors (en collaboration avec S.Williams) crie au scandale là aussi. « Ce n’est pas normal que le 150eme mondial ne gagne pas bien sa vie. On doit passer à un système égalitaire ou évidemment les meilleurs gagnent plus parce que le mérite fait partie du sport de haut niveau. Sur quels critères établir les prize money des uns et des autres ? Est-ce que ce n’est pas finalement le business que chaque joueur ou joueuse rapporte qui doit définir ses gains ? » Pour Mouratoglou, le cas du showman Nick Kyrgios, fantasque joueur australien qui n’hésite pas à servir à la cuillère ou à multiplier les coups entre les jambes pour régaler les spectateurs, parle de lui-même. « Un Kyrgios fait un bien phénoménal au tennis, mais je trouve qu’il n’est pas rémunéré en conséquence », déplore Mouratoglou, le cerveau en ébullition. « J’essaie de proposer des solutions. »

Découvrez l’UTS, la nouvelle compétition qui révolutionne le tennis

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