Le huis clos est-il viable sur la durée ?

Alors que les restrictions liées à la crise sanitaires se réduisent dans de plus en plus de pays, les circuits ATP et WTA sont en train de s’accorder sur une date de reprise et de retour à la normale. Mais à quoi va ressembler cette nouvelle donne ? Le tennis peut-il se permettre de jouer longtemps à huis-clos ?

Long Format : A quoi ressemblera le tennis ? (Partie 2) Long Format : A quoi ressemblera le tennis ? (Partie 2)

Encore deux mois à tenir. Les circuits ATP et WTA ne reprendront pas avant le 31 juillet, au plus tôt, en raison de l’épidémie de Covid-19. Mais il y a de bonnes raisons de penser qu’ils vont effectivement reprendre, à l’heure où les tournois exhibitions se multiplient dans cette attente, et où les tournois se préparent à de multiples aménagements.

À  quoi va ressembler le tennis professionnel à son retour ? Nous nous penchons sur la question dans une série en trois volets. Pour cette deuxième partie, voyons si le tennis peut se passer de ses spectateurs sur la durée. Alors que Roland-Garros envisage une jauge réduite pour son édition de septembre, l’US Open est résolu à jouer à huis-clos.

La perspective de jouer à huis-clos ne réjouit pas les meilleurs joueurs, c’est peu dire. Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic, habitués à se produire sur des courts centraux bondés, ont tous les trois exprimé publiquement leur scepticisme quant à cette possibilité. De même que Petra Kvitova et Simona Halep, qui ont souligné l’importance que peut avoir le public lors d’un match.

Wimbledon, qui a annulé son édition 2020 dès le 1er avril, n’a même pas envisagé de jouer à huis-clos, au motif que même sans spectateurs, l’organisation d’un tournoi du Grand Chelem nécessite un personnel trop important.

Bien sûr, le Grand Chelem londonien avait le luxe de disposer d’une police d’assurance couvrant le risque d’une pandémie, grâce à laquelle il touchera près de 125 millions d’euros. Pour ceux qui n’ont pas cette chance, dont l’US Open, accueillir un événement sans spectateurs permettrait de limiter la casse.

Dans une interview récente à la télévision serbe, Novak Djokovic s’est montré critique, expliquant que les restrictions qui étaient envisagées étaient “extrêmes“.

Baisse du prize-money à prévoir?

L’US Open veut absolument maintenir son édition 2020. Mais sans spectateurs, les organisateurs ne pourront pas compter sur les recettes de billetterie. Mais aussi celles de produits dérivées, restauration, etc. Cette baisse de revenus pourrait avoir un impact pour les joueurs.

“Sans spectateurs, quasiment tous les tournois devront réduire leur prize-money de façon importante”, nous confie Paul McNamee, directeur de l’Open d’Australie de 1994 à 2006.

Selon l’Australien, le tennis ne peut faire sans ses fans sur la durée :

“Plus de 50 % des revenus d’un tournoi viennent des spectateurs qui assistent aux matchs, que ce soit le grand public, les invitations liées aux sponsoring et les places hospitalité”, détaille t-il.

“On peut créer une ambiance fictive”

Mark Petchey, ancien coach d’Andy Murray, plus connu comme commentateur à la télévision, pense lui qu’il faut à contre coeur accepter de jouer à huis clos si c’est la seule option, et se montrer créatif.

“C’est certain que ce n’est pas idéal pour tous les tournois de se jouer à huis-clos et de ne pas pouvoir compter sur les revenus de billetterie. Mais s’ils arrivent à au moins dégager un profit, il faut jouer, affirme t-il. Bien sûr, ça va faire bizarre pour les joueurs de jouer sans public. Mais pour les téléspectateurs, je pense qu’on peut créer une ambiance fictive pour que la retransmission ressemble le plus possible à un match avec du public”.

Le court Philippe Chatrier avec son nouveau toit.

Des tournois comme l’Ultimate Tennis Showdown, avec un nombre restreint de joueurs et de personnel, sont plus facile à organiser dans le contexte sanitaire actuel. Et pour Mark Petchey, jouer des tournois est essentiel pour le tennis.

“Si on ne peut jouer que des tournois exhibitions pendant un certain temps, un an ou plus, c’est comme ça, assure le Britannique. Ça permettra de garder un lien avec les fans et d’éviter qu’ils ne se tournent vers d’autres sports qui ont repris. Déjà que le fan de tennis moyen est plutôt âgé, si en plus on perd des jeunes, ça ne va pas arranger les choses.”

“Du très grand tennis à huis-clos”

Les détracteurs du huis-clos pointent que les conditions de jeu seront très différentes que celles d’un match normal, que les joueurs seront beaucoup moins motivés, et que la qualité globale du spectacle en pâtira. McNamee est certain que même sans spectateurs, le niveau sera très élevé :

“Quand je repense aux meilleurs matchs auxquels j’ai pris part en terme de qualité de jeu, la plupart l’a été à l’entraînement, sans spectateurs, contre mon défunt ami Peter McNamara. Donc je suis convaincu que les joueurs peuvent proposer du très grand tennis à huis-clos.”

Rafael Nadal a indiqué à plusieurs reprises que la sécurité et l’égalité devaient être les principes régissant avant tout les modalités de la reprise. Pour lui, tant que tous les joueurs ne pourront pas être en mesure de se déplacer librement et de prendre part aux tournois, alors les circuits ne doivent pas reprendre.

Mais souvent, l’argent est roi. Et si l’US Open et Roland-Garros peuvent éviter une catastrophe financière en maintenant leurs éditions 2020, alors ils le feront.

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