Interview exclusive d’Alexei Popyrin : “L’envie d’être numéro 1 mondial et de gagner des Grands Chelems n’a pas disparu”

Alexei Popyrin, tout juste auréolé de son premier titre ATP, revient pour Tennis Majors sur sa semaine de rêve à Singapour, où il ne pensait même pas aller au sortir de l’Open d’Australie. 82e mondial, le meilleur classement de sa carrière, l’Australien ne cache pas des ambitions élevées, pour cette saison, et au-delà.

Popyrin Singapore trophy Popyrin Singapore trophy

Alexei Popyrin fait partie des victimes du COVID-19 sur le circuit masculin. Il n’a pas eu la maladie (du moins, pas qu’on sache), mais l’arrêt du circuit et les conditions spécifiques de reprise avaient eu raison de sa motivation en 2020.

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Cet hiver, l’Australien a décidé de prendre en main son destin, notamment en voyageant plus souvent sans ses parents et en pilotant son programme selon ses propres sensations. Résultat : Popyrin a décroché son tout premier titre sur le circuit ATP, à Singapour la semaine dernière, et occupe maintenant la 82e place mondiale, son meilleur classement en carrière. Dans un long entretien avec Tennis Majors, il nous confirme qu’à 21 ans, c’est seulement le début de l’histoire à ses yeux.

Alexei Popyrin, vous venez de remporter votre premier titre sur le circuit ATP à Singapour. Quelles sont les sensations que cela procure ?

Oh, ça fait du bien. Si nous avons travaillé si dur pendant la pré-saison, c’est pour ce type de moment. Ce n’est pas une fin en soi, comme je l’ai dit juste après. J’ai d’autres ambitions. Mais c’est vraiment un sentiment très agréable. Ces dernières années, mes débuts de saison étaient compliqués. J’obtenais des bons résultats à l’Open d’Australie, mais c’était tout. Je ne pense pas que je m’attendais à gagner un tournoi si tôt dans la saison. Mais le travail paie, voilà tout.

Quand avez-vous senti que ça pourrait être votre semaine ?

Je n’avais même pas prévu de m’aligner sur ce tournoi. Mais on s’est décidé quand d’autres joueurs ont commencé à se retirer, ce qui me permettait d’entrer directement dans le tableau principal. Nous nous sommes dit que si j’avais l’opportunité d’intégrer le tableau d’un tournoi ATP, c’était dommage ne pas y aller ? Au départ, je ne voulais pas, à cause de la quarantaine de 22 jours imposée si j’étais cas contact ou testé positif à la Covid-19. Mais ma mère m’a convaincu, en me rappelant qu’il n’y avait quasiment pas de cas en Australie et à Singapour, donc qu’il y avait très peu de chances que ça arrive. Ça m’a décidé. Les premiers jours étaient difficiles, c’était une bulle très stricte. Tu ne pouvais aller que sur le court et revenir à l’hôtel, et ainsi de suite. Pas d’autre ouverture. A ce moment-là, je voulais juste rentrer à la maison, je n’attendais rien de ce tournoi. Mais une fois les matchs commencés, je me suis focalisé sur un objectif. Je l’ai dit à mon physio : “Ecoute, on est ici pour une chose précise, le trophée. On ne va pas risquer 22 jours de quarantaine pour perdre au premier tour. On doit faire en sorte que ça paye.” Et ça a payé.

Alexei Popyrin, Singapore, 2021

Jouez-vous en ce moment le meilleur tennis de votre carrière et comment évalueriez-vous votre niveau de jeu ?

C’était bien le meilleur tennis de ma carrière. Pas en raison du niveau, mais parce que j’ai conservé un haut niveau sur une longue période, sur cinq matchs consécutifs. C’est un aspect sur lequel on a travaillé durant la préparation. Le niveau a toujours été là, y compris en Australie. Il me manquait juste une série de matchs à ce niveau. J’ai réussi ça à Singapour. Le problème avec mon tennis, c’est que j’ai toujours eu le niveau pour battre des super joueurs, mais c’était plus difficile de répéter ces performances toutes les semaines, à chaque match. Nous avons travaillé là-dessus. Ça vient doucement.

Quel était votre plan durant la pré-saison ?

J’ai disputé mon dernier tournoi de 2020 fin octobre et j’ai coupé jusqu’à début décembre. J’ai remis mes idées en place. Je suis allé à Londres, où vit ma petite amie, et j’y ai passé deux semaines et demie, sans même regarder une raquette de tennis. J’ai abordé la pré-saison le 1er décembre en me disant : “L’année dernière était pourrie, mais je vais l’oublier.” Les quatre premières semaines, nous étions à la Mouratoglou Tennis Academy. On s’est principalement concentrés sur la condition physique, beaucoup d’endurance, d’étirements. Mais la priorité, c’était l’endurance, pour garder un niveau sur une longue période. C’était vraiment dur, j’étais sur le court de 9 heures à 18 heures. Je m’entraînais à ce rythme parfois dix jours de suite. Pour la partie tennis, nous allions parfois à Monaco. Quelques semaines avant l’Australie, nous sommes allés à Dubai. J’ai joué avec Shapo (Denis Shapovalov), (Gaël) Monfils et (Karen) Khachanov). A Monte-Carlo, j’ai joué avec (Stan) Wawrinka et avec (Lorenzo) Musetti quelques fois.

 

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Ç’a été une longue pause (en novembre), mais il fallait que je la fasse parce que je ne prenais plus de plaisir à jouer au tennis. Je devais juste me vider la tête, essayer d’être heureux. J’ai emmené mon chien à Londres, Archie, il a quasiment un an maintenant. Vous l’aviez peut-être vu à l’UTS. Rien à voir, il se comporte bien mieux maintenant. C’était toute une aventure de bouger lui. On a pris le train de Nice jusqu’à Paris, et après on a conduit jusqu’à Londres.

Pourquoi l’année passée a-t-elle été si difficile ?

Le premier confinement est la période dont j’ai le plus profité depuis longtemps. C’était tellement cool. J’étais ici (à la Mouratoglou Academy, ndlr). J’étais avec toute ma famille, ma petite amie était avec moi pendant trois mois. On a passé du temps en famille à regarder des films et à jouer à des jeux de société. Je m’y suis habitué. Je ne faisais pas beaucoup de sport, j’ai pris quelques kilos. Ça n’a pas été simple de remettre en forme après ça. Je pense que tout ça s’est ressenti sur mon jeu. Et ce qui affecte mon jeu me touche mentalement, parce que je ne gagne pas de matchs. J’étais dans une spirale négative. Ce n’était pas facile, d’autant plus avec toutes les restrictions.

Alexei Popyrin at the Australian Open in 2020

Mentalement, je me disais : “C’est bon, j’en ai marre de perdre. Je ne veux plus perdre. Je veux travailler autant que possible pour ne plus me faire éliminer au premier tour de chaque tournoi. C’était ma motivation dans cette pré-saison. Je me suis vraiment poussé, plus que jamais. Je pense que je n’ai jamais été aussi fatigué dans une préparation. Mais ça marche. C’était ma force, c’est venu de moi. Je n’en pouvais plus de perdre.

Quel est le prochain objectif, pour cette saison et au-delà ?

J’ai le sentiment d’avoir autant de potentiel que quiconque. Depuis que je suis enfant, mon but est d’être numéro 1 mondial et de gagner des Grands Chelems. Je ne pense pas que cette envie ait disparu. Je crois que je peux le faire. Si tu ne penses pas en être capable, il n’y a aucun intérêt à jouer au tennis, honnêtement. Si tu n’y crois pas, tu ne vas pas y arriver, c’est aussi simple que ça. Qu’ils le disent ou non, tous les joueurs ont ça en eux s’ils sont pros. Mais je vais prendre match après match. Qui sait ce que je peux accomplir sur la suite de la saison ? Ça ne fait que deux mois et j’ai déjà atteint mon meilleur classement en carrière. Ce n’est pas comme si j’en avais terminé pour la saison. Tu vises toujours plus haut. Je ne me fixe aucune limite cette année.

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