Djokovic puis Tsitsipas ou Zverev : pourquoi Nadal est, lui aussi, face à un Everest

Le premier est le dernier à l’avoir battu à Roland-Garros, le deuxième est le dernier à l’avoir battu en Grand Chelem, le troisième est le dernier à l’avoir battu sur terre battue : Novak Djokovic, Stefanos Tsitsipas et Alexander Zverev représentent trois menaces pour Rafael Nadal dans la quête de son 14e Roland-Garros.

© Panoramic

Rafael Nadal n’a pas encore remporté son quatorzième Roland-Garros. Il le répète au moindre micro ouvert, à raison, et il faut aujourd’hui l’écouter. Il réalise depuis dix jours un parcours digne de ses meilleures années : un seul set abandonné (Schwartzman), mais surtout une capacité à aller chercher son meilleur tennis à chaque fois qu’il en a besoin, quel que soit le contexte. Dans ses déclarations publiques, plus Nadal a été chatouillé, plus il joue la carte de la saine humilité face aux médias. La seule, dit-il, capable de le mener à un trophée qui serait par ailleurs le vingt-et-unième Grand Chelem de sa carrière, record absolu en simple chez les hommes.

Alors que s’ouvrent les demi-finales, la prudence de Nadal prend tout son sens à la lecture du tableau. S’il devait triompher à l’issue de la finale, dimanche, il aurait franchi deux obstacles parmi les plus difficiles de sa carrière en Grand Chelem. Avec tout le respect dû au Federer de 2006, 2007 et 2008, qui était alors le seul joueur du monde supérieur à l’Espagnol par ses résultats, le parcours proposé à Nadal pour clore Roland-Garros 2021 a des allures de test ultime.

D’abord avec son grand rival en carrière, le seul joueur en activité contre qui il a été vu battu et vulnérable à Roland-Garros, Novak Djokovic, numéro un mondial, vainqueur de la première levée du Grand Chelem cette année, et par ailleurs très confiant depuis deux semaines sur l’hypothèse de retrouvailles avec Nadal. Ensuite Stefanos Tsistipas ou Alexander Zverev. Aucun de ces deux joueurs ne serait autre chose qu’un valeureux outsider contre Nadal en finale, comme Dominic Thiem l’avait été en 2018 et 2019. Mais ils ont récemment battu l’Espagnol dans un contexte qui a laissé des traces. Tsitsipas, notamment, au vu de son œuvre en 2021 contre Nadal, est un homme que l’Espagnol craint peut-être plus que tous les autres.

Djokovic, parce qu’il l’a déjà fait sur le Chatrier

  • Pourquoi c’est un défi à la hauteur de Nadal à Roland : Novak Djokovic a battu Rafael Nadal à 7 reprises sur terre battue et est le seul joueur encore en activité à avoir accompli cet exploit à Roland-Garros. C’était en 2015 en quart de finale (7-5, 6-3, 6-1).
  • Leur face à face : Djokovic mène 29-28 (19-7 pour Nadal sur terre battue)
  • Son Roland-Garros 2021 : Novak Djokovic arrive dans le dernier carré après avoir concédé trois sets : deux contre Lorenzo Musetti, qui a mené 2 manches à rien, et un contre Matteo Berrettini. Les deux Italiens l’ont chahuté mais le Serbe a fait preuve d’une grande force mentale pour s’en sortir. Il semble habité par sa quête d’un 19e majeur et sort son meilleur tennis quand il en a besoin.
  • Leur dernier match sur terre :
  • 16 mai 2021, Rome – Finale – Nadal bat Djokovic 7-5, 1-6, 6-3.
    Novak Djokovic n’a pas remporté de Masters 1000 sur terre cette saison. La faute, à Rome, à Rafael Nadal, qui montait en puissance après ses échecs à Monte-Carlo (quart de finale) et Madrid (quart de finale). Si le Serbe a largement remporté la deuxième manche, il a subi, impuissant, le retour en force de son plus grand rival, qui semblait revenu à un niveau très élevé, en tout cas bien plus que les semaines précédentes.
  • Comment il battrait Nadal : Grâce à son revers d’abord. Depuis le début de sa carrière, le lift de Nadal sur revers de droitier a peu d’emprise sur le revers de Djokovic. En plus d’être solide en défense, il est d’une folle variété : il peut jouer long et bombé, accélérer long de ligne, jouer croisé court, réaliser des amorties… Ses changements de direction et de trajectoire permanents avec ce coup peuvent nuire Nadal en l’empêchant d’imposer sa puissance.

    Djokovic aura besoin de son service. Avec un haut pourcentage de première balle, le Serbe aurait le contrôle de l’échange et serait à l’intérieur du court pour faire courir son adversaire. Il pourrait alors enfermer Nadal en jouant soit plein coup droit, soit plein revers, mais en évitant que ce dernier puisse se décaler en coup droit où il peut devenir injouable.

    Les conditions plus chaudes et ensoleillées en ce début du mois de juin pourraient bien plus lui convenir que celles de la finale de l’an dernier, où Nadal l’avait surclassé pour remporter son treizième Roland-Garros. Lors de leur demi-finale si accrochée de 2013, c’était la même météo estivale. Il est cependant probable que la rencontre se finira sous les feux des projecteurs.
  • A voir : ce vendredi pas avant 17h30, sur le court Philippe-Chatrier.

Stefanos Tsitsipas, parce qu’il a inversé le rapport de force en 2021

  • Pourquoi c’est un défi à la hauteur de Nadal à Roland : Tsitsipas est n°1 à la Race et est le dernier joueur à avoir battu l’Espagnol en Grand Chelem. Un mémorable quart de finale où le Grec avait réussi l’exploit de revenir de deux à sets à zéro et de s’imposer aussi bien physiquement que tennistiquement à l’Espagnol : 3-6, 2-6, 7-6, 6-4, 7-5. Tistsipas a aussi déjà dominé Nadal sur terre battue, en 2019 à Madrid, et il est passé proche de le refaire cette année à Barcelone.
  • Leur face à face : Nadal, 7-2 (3-1 pour Nadal sur terre battue)
  • Son Roland-Garros 2021 : Dans la lignée de sa saison sur terre battue, très solide. Stefanos Tsitsipas a évité les pièges Chardy et Martinez et n’a concédé qu’une seul set jusqu’alors, contre John Isner au troisième tour. Sa victoire probante contre Daniil Medvedev prouve qu’il est en pleine confiance. 
  • Leur dernier match sur terre :

    25 avril 2021, Barcelone – Finale – Nadal bat Tsitsipas 6-4, 6-7, 7-5
    Stefanos Tsitsipas était tout proche de faire tomber pour la première fois Nadal en finale à Barcelone et de le priver d’un douzième sacre en terre catalane. Mais dans une rencontre où la variété des coups et des trajectoires était impressionnante, Tsitsipas a craqué malgré une balle de match. Ses quelques sautes de concentration l’ont condamné.
  • Comment il battrait Nadal : En pratiquant un tennis ultra-agressif, les deux pieds à l’intérieur du court.
    A l’Open d’Australie, Tsitsipas avait battu Nadal à la régulière : il avait fini par le dominer en fond de court, en étant à un mètre environ derrière sa ligne de fond. L’Espagnol avait commis des fautes directes assez nettes sur des balles parfois neutres. Tsitsipas était même moins monté au filet que son adversaire. A Barcelone, Tsitsipas était parvenu à revenir sur Nadal en tournant dès qu’il pouvait autour de son revers pour se décaler en coup droit et monter au filet pour conclure le point. Dans ce Roland-Garros, il en est à 77 % de réussite au filet, avec plus de 25 montées en moyenne par match. S’il arrive, sur son revers à une main, à repousser les assauts de Nadal en coup droit, il est en mesure de réaliser l’exploit. Il faut s’attendre à un Tsistipas au moins aussi agressif que contre Medvedev.
  • A voir le : S’il se qualifie en finale, dimanche, à partir de 15 heures, court Philippe-Chatrier.

Alexander Zverev, le dernier à l’avoir fait

  • Pourquoi c’est un défi à la hauteur de Nadal à Roland : Zverev est le dernier joueur à avoir battu Nadal sur terre battue. C’était à Madrid, en quart de finale, il y a quatre semaines.
  • Leur face à face : Nadal, 6-3 (4-1 pour Nadal sur terre battue).
  • Son Roland-Garros 2021 : Après une entame de tournoi très poussive où il était mené 2 sets à 0 contre son compatriote Otte, Alexander Zverev s’est parfaitement repris et reste sur 15 sets de suite remportés. Il ne s’est jamais aussi facilement qualifié pour les demi-finales d’un Grand Chelem. S’il s’offre Tsitsipas vendredi, ce serait sa première grande perf’ dans un Majeur. 
  • Leur dernier match sur terre
    14/05/2021, Rome – Quart de finale – Nadal bat Zverev : 6-3, 6-4

    Après une semaine où il a triomphé à Madrid, Alexander Zverev est apparu émoussé à Rome. 26 fautes directes, 1 sur 10 sur balle de break. Les conditions moins “aériennes” en Italie lui ont moins convenu, au contraire de Nadal, plus solide et plus opportuniste, qui s’est offert une revanche.
  • Comment il battrait Nadal : Pour s’offrir Nadal à Madrid, Alexander Zverev avait été formidable derrière son service (82 % de points gagnés derrière sa première balle, seulement deux balles de break à sauver), mais aussi de justesse et d’agressivité, avec 28 coups gagnants dont 18 en coup droit. Souvent trop passif, notamment pour un top player, l’Allemand ne l’avait pas été à Madrid et cela lui avait permis, dans des conditions d’altitude qui lui convenaient parfaitement, de toujours contrôler l’échange. Il était également parvenu, alors qu’il défendait plusieurs mètres derrière sa ligne de fond, à renverser des échanges en terminant à l’intérieur du court. A Roland-Garros, où la terre est similaire à celle de Rome, Zverev ne peut se permettre d’être passif dans l’échange, sinon, il risque d’être corrigé par l’Ibère.
  • A voir le : s’il se qualifie en finale, ce dimanche à partir de 15 heures, court Philippe-Chatrier.

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